L'ARNm, un secteur de recherche très encadré par les brevets

Le Figaro voit dans l'abandon des travaux de l’Institut Pasteur sur son vaccin de la Covid-19, le symptôme de difficultés plus profondes. Il pointe en particulier le virage manqué de la révolution de l'ARNm, dont l'une des principales raisons est purement économique. "Ce domaine de recherches est déjà très encadré par de nombreuses protections intellectuelles", explique Bernard Verrier, spécialiste de l’ARN messager à l’université Claude-Bernard de Lyon. Pour débuter de nouveaux travaux, un scientifique doit donc payer un brevet ou innover. "Cela limite les marges de manœuvre et va demander beaucoup de créativité aux chercheurs pour créer de la nouvelle propriété intellectuelle." Sanofi d'ailleurs s’est associé avec la société américaine Translate Bio pour entrer dans le domaine de la vaccination à ARN. Sans brevet sur l’ARN messager, Pasteur est pourtant parti assez confiant en pariant sur un vaccin à vecteur viral, à partir du virus de la rougeole. "Un risque logique", pour Christian Bréchot, directeur de l’Institut Pasteur de 2013 à 2017, mais qui s'est finalement soldé par un échec, annoncé en janvier dernier. Mylène Ogliastro, virologue à l’Inra-Université de Montpellier, ne rejette toutefois pas la faute uniquement sur les équipes de l'institut. "On ne peut pas dissocier ces difficultés de celles qui traversent plus largement la recherche française. Les politiques nationales de soutien à la recherche n’ont eu de cesse depuis vingt ans de diminuer les financements. Nous n’avons tout simplement plus les moyens de nos ambitions. On forme des jeunes, mais ils sont contraints de partir. On n’a pas le tissu d’innovation pour les retenir."

(Le Figaro – 6 avril 2021)