L'accès au marché des nouveaux anticancéreux ralentit en France

Certains cancérologues français, comme Aurélien Marabelle, directeur clinique du programme d'immunothérapie de l'Institut Gustave-Roussy, s'inquiètent de l'indisponibilité en France de certains anticancéreux innovants. "Ils ont prouvé une bien meilleure efficacité que les standards actuels et ont été approuvés par les autorités européennes et américaines, mais c'est au niveau français qu'il y a blocage", déplore le praticien. "Les malades français n'y ont pas accès dans des cancers fréquents, face auxquels les cancérologues sont assez démunis". Le Keytruda® (pembrolizumab) de l'américain Merck MSD par exemple est autorisé en Europe depuis décembre 2016 en traitement du cancer du poumon en première ligne. Il a démontré lors des essais un bénéfice de survie important, comparé aux traitements de référence. Mais il ne peut pas être prescrit en France, faute de prix fixé par les autorités, alors que de nombreux malades sont potentiellement concernés. Il est également exclu du dispositif d'autorisation temporaire d'utilisation (ATU), qui ne concerne que la première indication dans laquelle un nouveau médicament est prescrit. Or, le Keytruda® en a déjà bénéficié pour le traitement du mélanome (cancer de la peau), expliquent Les Echos. Un exemple qui n'est pas isolé. Face à l'arrivée de nombreuses innovations thérapeutiques, les autorités de santé retardent en effet l'octroi du prix pour limiter leur impact sur les dépenses. Les évaluations sont également plus contraignantes: "On a des nouveaux anticancéreux dont les résultats en termes de survie auraient fait il y a dix ans la une des médias, et aujourd'hui on rechigne à leur donner une bonne ASMR", tempête Jean-Yves Blay, directeur du Centre Léon Bérard à Lyon. Selon lui, le mode de fonctionnement actuel pénalise l'innovation, alors que certains traitements inefficaces, ou moins efficaces que les nouveaux, sont remboursés. 

(Les Echos - 18 octobre 2017)