Antidépresseurs : "le problème n'est pas tant une surprescription qu'une mauvaise prescription"

L'Obs publie un dossier sur les traitements de la dépression. Une maladie qui frappe une personne sur cinq au cours de sa vie en France, et qui est responsable à elle seule de près de la moitié des arrêts de travail. Contrairement aux idées reçues, les Français ne sont toutefois pas les champions de la consommation d'antidépresseurs, loin de là. Notre pays n'est qu'au 17e rang du classement établi par l'OCDE. Alors que les Etats-Unis ont augmenté leur consommation de 400% depuis 2000. Mais ces traitements montrent aujourd'hui leurs limites. Malgré leur efficacité, les effets secondaires sont parfois très lourds - prise de poids, libido en berne... - et la guérison, pas forcément au rendez-vous. "Les antidépresseurs masquent les symptômes de la maladie, mais n'en traitent pas la cause", explique Guillaume Fond, psychiatre, médecin en santé publique à l'hôpital de la Conception à Marseille et enseignant-chercheur à la faculté de la Timone. "Une personne sur deux rechute après le traitement." Mais selon Pierre-Michel Llorca, psychiatre au CHU de Clermont-Ferrand, "le problème n'est pas tant une surprescription qu'une mauvaise prescription. Des personnes qui devraient en prendre ne sont pas traitées, et d'autres en prennent alors qu'elles n'en ont pas besoin. Aujourd'hui, ce sont majoritairement les généralistes qui les donnent. Or ils n'ont pas toujours le temps d'analyser les plaintes de leurs patients." Les spécialistes insistent également sur l'importance de l'hygiène de vie des patients. "Comment une personne peut-elle espérer aller bien si elle ne prend pas soin d'elle, de son cerveau et de son corps ?" lance Guillaume Fond.

(L'Obs - 9 mai 2019)